Code de commerce : Chapitre V : Du bail commercial. (Articles L145-1 à L145-60)
Dans le cas où le locataire d’un local commercial (désigné sous le terme “cédant”) souhaite transférer son contrat de location à une autre personne (le “cessionnaire”), cela implique qu’il transfère également son
droit au bail.
Cette transmission peut se faire indépendamment ou simultanément avec la cession du
fonds de commerce.
En général, le contrat de bail comporte des clauses spécifiques qui définissent les modalités de la cession ; il peut s’agir par exemple de la nécessité d’un acte notarié ou de l’obtention de l’accord du propriétaire.
I – Qu’est-ce que la cession de droit au bail ?
Le terme “cession du droit au bail”, connu également sous le nom de “cession du bail commercial”, désigne un
contrat par lequel le locataire d’un local commercial transfère à une autre personne (le cessionnaire) le droit de bénéficier du bail. Il lui cède ainsi la possibilité de jouir des locaux, l’obligation de s’acquitter du loyer et de respecter les termes de la location. Bien que le bail commercial initial demeure, le locataire est remplacé par le cessionnaire.
En pratique, les propriétaires interdisent généralement à leur locataire de céder leur droit au bail en insérant une clause dans le contrat de bail commercial.
En revanche, le propriétaire ne peut pas interdire au locataire de le céder lorsque ce dernier souhaite vendre son fonds de commerce. Il ne peut pas non plus interdire la cession du bail qui est transmis dans le cadre d’une fusion, d’une scission, d’un apport partiel d’actif ou d’une transmission universelle de patrimoine
1 – Cession du bail commercial seul
Il est possible pour un locataire de céder son droit au bail indépendamment de la vente de son fonds de commerce. Cependant, avant de procéder à cette cession, il doit s’assurer que le contrat de bail autorise la cession du seul droit au bail, souvent appelé “cession de pas de porte”.
Même si le contrat n’interdit pas la cession, le consentement du propriétaire est habituellement nécessaire avant toute transmission.
De plus, le locataire doit se renseigner auprès de la mairie pour savoir si le bail concerné est situé dans un “périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité” car, si tel est le cas, la commune peut utiliser son droit de préemption. Elle sera donc prioritaire pour acheter le droit au bail.
Après la cession du bail, le nouveau locataire (le “cessionnaire”) remplace l’ancien locataire (le “cédant”)
pour la durée restante du bail.
2 – Transfert du droit au bail commercial lors de la vente d’un fonds de commerce
Il faut savoir que lors d’une cession d’un fonds de commerce,
le droit au bail commercial est obligatoirement inclus dans la transaction. Rappelons que le fonds de commerce regroupe les éléments matériels et incorporels à savoir l’enseigne, la marque, l’équipement, la clientèle, la réputation et les contrats de travail en cours. Les stocks de marchandises et l’autorisation d’occupation de l’espace public en sont exclus.
L’acquéreur d’un fonds de commerce achète donc
tous les éléments de ce fonds.
La clientèle est considérée comme l’élément le plus important car, sans elle, le fonds de commerce ne peut pas être viable. Lorsqu’il n’y a pas de clientèle attachée au fonds de commerce, la transaction de cession ne peut pas être considérée comme une vente de fonds de commerce, mais plutôt comme une simple cession de droit au bail.
Lors de la vente du
fonds de commerce, le propriétaire ne peut s’opposer à la cession du bail. En effet, les clauses du contrat de bail interdisant la cession du bail lors de la cession du fonds de commerce ne sont pas valables.
Cependant, la cession peut être soumise à certaines conditions. Par exemple, une clause d’agrément (c
lause présente dans les statuts permettant de contrôler l’entrée de nouveaux actionnaires ou associés dans la société) qui prévoit que les associés doivent donner leur accord à chaque cession de parts sociales ou d’actions ou une clause autorisant la cession du bail uniquement en cas de vente totale du fonds.
De la même manière qu’une cession de bail commercial seul, si la cession du fonds de commerce se produit dans un périmètre de sauvegarde, la mairie peut exercer son
droit de préemption.
3 – En cas d’une fusion, scission, d’un apport partiel d’actifs ou d’une transmission universelle de patrimoine
Dans cette hypothèse, une société, locataire d’un bail commercial, est absorbée dans le cadre d’une
fusion (opération qui consiste à réunir deux ou plusieurs sociétés ou entreprises pour en former une seule), d’une
scission (opération par laquelle une société disparaît en transmettant son patrimoine à deux autres sociétés qui existent déjà ou sont créées pour l’occasion); ces sociétés sont appelées sociétés bénéficiaires, fait l’objet d’un
apport partiel d’actif (opération par laquelle une société apporte une partie de son actif à une autre société, dite bénéficiaire, en échange de titres dans le capital de cette dernière) ou d’un
transfert universel de patrimoine.
Dès lors, la société absorbante ou bénéficiaire de l’apport devient instantanément
propriétaire du droit au bail, sans avoir à effectuer de formalités particulières.
Le propriétaire ne peut pas s’opposer à cette cession. Les clauses du contrat de bail qui interdisent la cession du bail commercial dans ces situations sont considérées comme nulles.
II – Locataire prenant sa retraite : peut-il céder son droit au bail commercial ?
Art L.145-51 et 145-52 du Code du Commerce
Le locataire ayant demandé à bénéficier de ses droits à la retraite, ou admis au bénéfice d’une pension d’invalidité,
est autorisé à céder son droit au bail seul. Le propriétaire
ne peut pas interdire cette cession.
Pour la réaliser, le locataire doit néanmoins respecter les deux conditions suivantes :
- il doit être associé unique d’une EURL (Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée) ou gérant majoritaire depuis au moins 2 ans de la SARL (Société A Responsabilité Limitée) qui est titulaire du bail
- la nouvelle activité doit être compatible avec la destination, les caractéristiques et la situation de l’immeuble.
Exemple :
L’implantation d’une laverie automatique nécessitant l’installation de plusieurs machines bruyantes est incompatible avec l’usage résidentiel d’un immeuble.
Le locataire notifie par
acte de commissaire de justice (un document rédigé par un professionnel habilité à cet effet, anciennement appelé huissier de justice et commissaire-priseur judiciaire) au propriétaire et aux créanciers privilégiés (bénéficiant d’une garantie : nantissement, gage, hypothèque, etc.) son intention de céder le bail.
L’ acte de commissaire de justice indique la nature de l’activité envisagée ainsi que le montant de la cession.
Dans un délai de 2 mois après avoir reçu l’acte, le propriétaire a l’une des possibilités suivantes :
-
- Accepter le changement d’activité et donner son accord à la cession de bail
-
- Exercer la priorité de rachat du droit au bail prévue par la loi
- Contester la mise en place de la nouvelle activité et engager une procédure devant le tribunal judiciaire
III – La cession du bail commercial peut-elle être refusée par le propriétaire ?
Le contrat de bail peut inclure une clause permettant au propriétaire de refuser la cession du bail commercial. Elle peut aussi imposer l’obtention préalable de son autorisation.
Il est également possible d’ajouter d’autres clauses précisant les modalités de la cession dans le contrat.
1 – Clause qui interdit la cession du droit bail commercial seul
Une clause interdisant la cession
uniquement pour le droit au bail peut être ajoutée au contrat de bail commercial. Toutefois, ce contrat ne peut pas empêcher le locataire de céder le bail commercial lors de la vente de son fonds de commerce, car cela est essentiel pour la transmission du fonds.
2 – Clause de consentement du propriétaire ou clause d’agrément dans un contrat de bail commercial
Une clause d’ agrément dans un tel contrat implique que le locataire doit obtenir l’accord préalable du propriétaire avant toute cession. Le propriétaire décide ainsi d’accepter ou non le candidat à l’acquisition du bail. En général, l’autorisation doit être accordée par écrit (précisé dans le contrat).
3 – Clause de garantie solidaire
La clause de solidarité permet aux deux parties de s’engager conjointement au paiement des loyers et à l’exécution du bail commercial. Cette solidarité crée entre elles un lien juridique, les obligeant chacune à payer l’intégralité des sommes dues. La solidarité peut résulter de la loi, comme dans le cas du paiement des droits de succession.
Le propriétaire peut réclamer le paiement du loyer au cédant du bail, c’est-à-dire l’ancien locataire, pendant une durée de 3 ans à partir de la cession.
Cette durée de 3 ans concerne les cessions de droit au bail conclues après le 19 juin 2014.
La clause de garantie solidaire cesse à l’expiration du bail. Elle ne produit pas d’effet en cas de
renouvellement de celui-ci.
Si le bail commercial est
prolongé tacitement, cela ne signifie pas qu’un nouveau contrat est conclu. Ainsi, la clause de solidarité demeure applicable jusqu’à son expiration.
À noter que cette clause ne s’applique pas en cas de
sauvegarde ou de
redressement judiciaire du locataire
La loi impose au propriétaire de notifier à l’ancien locataire (cédant) tout défaut de paiement de loyer par le repreneur (cessionnaire) dans un
délai d’un mois à partir de la date d’échéance. Pour des raisons de preuve, il est recommandé d’informer le cédant par lettre recommandée avec accusé de réception.
Par exemple, si le loyer n’a pas été payé au 10 mai 2020 par le nouveau locataire, le bailleur a jusqu’au 10 juin 2020 pour en informer le cédant et peut faire appel à la garantie solidaire jusqu’au 10 mai 2023, après quoi elle ne sera plus utilisable.
4 – Clause d’appel du bailleur à participer à l’acte de cession
L’ objectif de cette clause est d’informer le propriétaire de la cession du bail. Ainsi, la cession se fait en sa présence et il est informé de l’identité du repreneur. Toutefois, il n’a pas à donner son autorisation.
IV – Quelles sont les démarches à suivre pour effectuer la cession du droit au bail commercial ?
Pour se faire, la cession nécessite les étapes suivantes :
1. Élaboration d’un contrat de cession
Le transfert du bail commercial peut être réalisé par la signature d’un
contrat écrit entre les parties ou par la réalisation d’un
acte notarié. Il peut également être formalisé sous la forme d’un avenant au
bail commercial, c’est-à-dire un document complémentaire au contrat initial qui constate une modification, une adaptation (ou un complément) qui a été convenue d’un commun accord entre les deux parties.
2. Établissement d’un état des lieux
Avant la fin du bail commercial, le propriétaire et le locataire sortant, ou un tiers mandaté par eux (une agence immobilière par exemple), doivent procéder à un état des lieux.
Un exemplaire de celui-ci est conservé par chacune des parties.
3. Information du bailleur
Comme précisé plus haut, il est nécessaire de notifier la cession du bail commercial au propriétaire par l’intermédiaire d’un
acte de commissaire de justice, sauf si celui-ci a accepté la cession du droit au bail par acte notarié
Cette notification doit comporter les informations suivantes : l’identité du cessionnaire (c’est-à-dire le repreneur du bail), ses coordonnées, la date de la cession (pour déterminer à partir de quel moment il est redevable du paiement du loyer, etc.).
4. Enregistrement et publicité de la cession de droit au bail
L’acte de cession de droit au bail commercial doit être enregistré auprès du Service des Impôts des Entreprises (SIE) du lieu de cession, au service des impôts du notaire si c’est un acte notarié.
L’ enregistrement de l’acte doit être effectué dans
le mois suivant sa signature, les droits d’enregistrement étant à la charge du repreneur (cessionnaire). L’acte de cession peut prévoir que ce n’est pas le cas.
Ces droits d’ enregistrement sont calculés sur le prix de cession de la manière suivante :
-
- 3 % entre 23 001 € à 200 000 €
-
- Et 5 % au-delà de 200 000 €
Un minimum de droit fixe de
25 € est perçu.
Si les formalités de cession ne sont pas respectées, la vente ne peut être réalisée ; cela peut entraîner la résiliation et/ou le non-renouvellement du bail initial. Il est donc important de veiller à la bonne exécution de ces formalités pour éviter des conséquences préjudiciables pour les parties concernées.
Source : Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre), Ministère chargé de la justice